Crédit photo : Better Cotton/Baran Vardar. Harran, Turquie 2022. Ali Gümüştop, meilleur ouvrier agricole en coton, 52 ans.
Alessandra Barbarewicz

Par Alessandra Barbarewicz, responsable principale du travail décent chez Better Cotton

En avril 2024, l'Organisation internationale du travail (OIT) a publié un rapport sur la sécurité et la santé au travail dans un climat en changement, mise en évidence l'impact que le changement climatique a déjà sur la santé et la sécurité des travailleurs dans toutes les régions du monde. Des données récentes indiquent que plus de 2.4 milliards de personnes, soit une part importante de la main-d'œuvre mondiale de 3.4 milliards, sont confrontées à la menace d'une exposition excessive à la chaleur sur leur lieu de travail.

L’agriculture se démarque parmi les secteurs les plus touchés par le changement climatique, notamment dans les régions tropicales et subtropicales. Ces régions connaissent des chaleurs extrêmes et disposent d’une main d’œuvre importante engagée dans les activités agricoles. Travaillant souvent dans des environnements informels, les travailleurs effectuent des tâches extérieures physiquement exigeantes dans des conditions difficiles.

En ligne avec la Les principes et droits fondamentaux au travail de l'OIT, Better Cotton reconnaît l'importance primordiale de répondre aux problèmes de santé et de sécurité afin de maintenir des conditions de travail équitables pour les personnes engagées dans la culture du coton.

Dans notre norme au niveau de l'exploitation récemment mise à jour, les Principes et Critères (P&C) version 3.0, nous avons renforcé nos exigences en matière de sécurité et de santé au travail pour tous les agriculteurs et travailleurs (Critère 5.8). Les indicateurs améliorés de santé et de sécurité prévoient des pauses régulières avec accès à de l'eau potable, ainsi que des dispositions en matière d'ombre pour atténuer les dangers de stress thermique, d'exposition aux rayons UV nocifs et de déshydratation.

L'augmentation des températures due au changement climatique peut également augmenter le risque de fatigue chez les travailleurs et potentiellement conduire à une diminution de l'attention lors de tâches dangereuses. Les P&C obligent donc les producteurs à identifier et à atténuer de manière proactive les dangers, tout en assurant une formation complète en matière de santé et de sécurité pour toutes les personnes impliquées dans les opérations agricoles, avec un accent particulier sur les personnes les plus vulnérables aux risques.

Comme le souligne le rapport de l’OIT, les répercussions du changement climatique sur les travailleurs agricoles vont au-delà de la simple exposition à une chaleur excessive, créant un « cocktail de dangers » qui présentent des risques sanitaires importants. Avec la hausse des températures, l’efficacité des pesticides devrait diminuer, à mesure que les populations de ravageurs augmentent et que leur répartition géographique change. Ces changements peuvent entraîner l'utilisation de pesticides plus toxiques et des pulvérisations plus fréquentes, ce qui augmente le risque d'exposition des travailleurs. Cela a des impacts à la fois à court terme et chroniques sur la santé, en particulier lorsqu'ils sont aggravés par une exposition excessive à la chaleur.

Dans la dernière version de notre norme, un accent considérable est mis sur la réduction du recours aux pesticides chimiques. Cela implique de recourir aux HHP uniquement comme dernière option dans le cadre des stratégies de lutte intégrée contre les ravageurs (IPM), en garantissant une manipulation et une élimination sûres des conteneurs de pesticides et en rendant obligatoire l'utilisation d'équipements de protection individuelle (EPI) appropriés au minimum.

L'approche de lutte intégrée contre les ravageurs (IPM) est la pierre angulaire de notre principe de protection des cultures, qui encourage les agriculteurs à favoriser une culture robuste tout en minimisant les perturbations des agroécosystèmes. Cette approche privilégie les méthodes non chimiques, les pesticides conventionnels étant utilisés en dernier recours, réduisant ainsi l'exposition et les risques pour la santé des travailleurs. Pour plus d’informations sur l’IPM, vous pouvez explorer notre blog dédié ici.

Enfin, la norme reconnaît l'interaction entre le changement climatique et les disparités sociales à travers plusieurs principes, notamment le travail décent et la protection des cultures, en introduisant le changement climatique et l'égalité des genres comme priorités transversales dans l'ensemble des P&C. Par exemple, dans un paysage climatique changeant, les femmes peuvent être plus exposées au stress thermique en raison des exigences vestimentaires supplémentaires en raison des normes culturelles, et plus vulnérables à l'exposition aux pesticides en raison des tâches spécifiques qu'elles effectuent ou lorsqu'elles sont enceintes ou allaitantes. Les producteurs doivent donc faire preuve d’une attention particulière aux exigences des femmes engagées dans les activités de terrain et prendre les mesures en conséquence.

La clé de la mission de Better Cotton est de se concentrer à la fois sur l’amélioration continue et la collaboration multipartite. C’est pourquoi le simple respect des règles ne suffit pas ; nous devons travailler avec les producteurs pour les soutenir dans leurs efforts d'amélioration continue de leurs pratiques. Nous reconnaissons également que la résilience des agriculteurs face au changement climatique ne peut être obtenue de manière isolée ; cela nécessite une collaboration entre diverses parties prenantes, notamment les communautés agricoles, les acteurs de la chaîne d’approvisionnement, les ONG et les gouvernements.

En tant qu'initiative multipartite, Better Cotton peut jouer un rôle important en rassemblant diverses parties prenantes pour atténuer les effets négatifs sur les droits de l'homme et l'environnement, garantissant ainsi un avenir durable à toutes les personnes impliquées dans la production de coton. La collaboration multipartite est particulièrement importante compte tenu de la nouvelle Directive européenne sur le devoir de diligence en matière de durabilité des entreprises (CSDDD), qui appelle les entreprises à entreprendre une évaluation complète des impacts négatifs de leurs opérations sur les communautés au sein de leurs chaînes d'approvisionnement.

Partager cette page